Noir.
La lune est pleine pourtant, mais l’ombre qui parcourt le chemin qui mène à la porte ne reflète rien. Une obscurité est sortie de là-bas, de la lisière de la forêt. Elle s’est détachée des arbres et s’est avancée. Elle se meut sans un mouvement, comme si elle reposait sur une charrette aux roues bien huilées qui se déplacerait seule.
Rien ne l’accompagne. Pas un cri d’oiseau, pas un crissement de gravier.
Silence.
Petit à petit la silhouette se rapproche. Impossible de distinguer clairement ce qu’elle est. Impossible de mettre un nom sur cette chose. Les rares témoins de la scène ne réussissent pas à ordonner correctement leurs idées, comme si la raison elle-même était happée par la forme statique.
Elle avance pourtant, d’une allure de corbillard. D’une allure de celui pour qui le temps ne compte pas. De l’allure de celui qui sait qu’il arrivera au moment choisi.
L’ombre est déjà là. Devant la porte. Comme si elle attendait qu’on vienne lui ouvrir. Personne. Personne ne vient. Il est tard, tout le monde dort. Qui voudrait d’ailleurs ouvrir à un voyageur inconnu et plutôt inquiétant ? Mieux vaudrait lui laisser porte close ou lui envoyer quelques traits empennés pour lui montrer qu’il n’est pas le bienvenu.
Les portes s’ouvrent pourtant à deux battants. Nul n’est là. Mais l’huis semble avoir choisit de laisser passer ce reflet du néant. L’ombre pénètre la cité laissant le porche se refermer derrière lui.